Rif et Jerrada, ses deux ignominies que Mohammed VI aimerait faire oublier

PREAMBULE

Notre amie Marie-JO FRESSARD qui mène une lutte incessante pour dénoncer les crimes du Makhzen contre les militants, les activistes et les journalistes marocains,  est en passe de publier un nouveau livre faisant le recueil des événements du Rif et de Jerrada. Deux tragédies qui coûtent le prix fort et ont parfois coûté la vie à nos amis des deux Hiraks.

Marie-Jo m’a aimablement demandé de signer la préface de son livre. J’en suis honoré. J’ai, à mon tour,  demandé à mon Ami Maarten Wolterink, célèbre dessinateur de nous confectionner une caricature appropriée. Je vous en  livre la primeur en attendant la parution du livre en question.

PREFACE

A l’heure où ce livre est en gestation, l’Ukraine est  aux prises avec l’invasion russe. Vladimir Poutine, dictateur  brutal et mafieux dont on se souvient qu’il fut le bourreau de la Tchétchénie, de la Géorgie, de la Crimée et dernièrement de la Syrie,  a finalement osé sauter le pas pour s’en prendre à son voisin ukrainien. Les démocraties occidentales ne sont pas exemptes de fautes dans cette sombre affaire. Elles ont appuyé des dirigeants ukrainiens pour la plupart corrompus et cupides qui ont provoqué un exode de plus de dix millions de leur compatriotes à la recherche d’un avenir. Les européens n’ont également eu de cesse de vouloir étendre leur communauté à l’Ukraine tout comme les Etats-Unis d’intégrer le pays à l’OTAN. Tous ont préféré se persuader que le néo-tsar de Russie n’avait aucun intérêt à joindre l’acte à la parole. C’était mal connaître le tyran, assassin présumé de journalistes, empoisonneur avéré de ses opposants, tueur impitoyable « jusque dans les chiottes » comme il se plut à le vitupérer lui-même. Partout où ses troupes sont passées tout n’est plus que ruine, désolation et mort.

Les tyrans siamois de leurs méfaits

Grandes ou petites, les tyrannies sont siamoises par leurs méfaits. L’Occident qui se complaît dans sa zone de confort préfère regarder ailleurs quand il ne soutient pas clairement  les despotes.  Pourtant l’histoire l’a bien souvent démontré, hormis la gradation dans la nuisance, les tyrans restent prévisibles. Ils commencent par s’en prendre aux plus vulnérables afin d’expérimenter le modus operandi de leurs exactions, tester la détermination de leurs victimes et la réaction de la communauté internationale,  avant de finalement élargir leur champ de manœuvre et étendre leur oppression. Avant de s’en prendre à l’Ukraine, Poutine ne s’était-il  pas sauvagement acharné sur Grozny, puis avait effectué un tour de chauffe en Ossétie avant de s’en prendre à la Syrie où son aviation et son artillerie ont pris un soin particulier à raser Alep dans sa quasi-totalité ?!

A cinq mille kilomètres de Moscou, sévit un autre despote. Plutôt soft à ses débuts,  Mohammed VI s’acharne à présent, à rattraper le retard pris sur la tyrannie de son père Hassan II. Mais plutôt que de ne puiser que dans le registre primaire de la brutalité, le locataire des Sablons préfère la draper des oripeaux d’une  justice aux ordres prononcée qui plus est,  en son nom,  ce qui revient clairement à revendiquer cette forme de répression.  Justice expéditive destinée à salir, maculer, souiller et diffamer pour mieux faire oublier la corruption, la cupidité et la captation éhontée des richesses du pays. Crimes et délits antinomiques du costume de commandeur des croyants que le tyran se plaît à revendiquer. A ce florilège indigne, il faut encore mettre au débit de Mohammed VI,  la normalisation avec l’Etat hébreux, contre l’avis de sa population et de la rue arabe, au moment même où Tel-Aviv amplifie la répression dans les territoires occupés, le vol des terres  et les assassinats quotidiens de palestiniens.

Vigie des consciences

Marie-Jo FRESSARD

En signant ce nouveau livre qui  fait la compilation des événements du Rif, de Jerrada et des Hiraks éponymes, Marie-Jo Fressard campe son rôle habituel de vigie des droits de l’homme,  sans cesse bafoués par le Makhzen dont on s’interroge jusqu’où ce dernier compte aller. Habituée à dénoncer et à sonner  l’alerte à la moindre exaction du régime, la militante nous livre ici un recueil précieux parce qu’il fait le récit de deux dramaturgies.  Arrêtons-nous un instant sur celle du Rif, victime expiatoire de toutes les ignominies et de tous les malheurs. Anthologie d’abominations entre guerre coloniale, coalition internationale,  crimes de guerre,  crimes contre l’humanité, expéditions punitives à répétition  du gouvernement  central, exécutions sommaires,  fosses communes, ostracisme, mainmise  de la mafia au pouvoir sur le territoire et ses richesses, misère, répression, emprisonnement, disparitions forcées, émigration clandestine. Si le Rif  est à ce point l’objet de tant de persécutions c’est parce qu’il est le terreau de tous les superlatifs : courage, abnégation,  résistance, fidélité et sens de l’honneur. Tout ce qui horripile le Makhzen et son chef, accoutumés à la soumission, à l’assujettissement et au misérabilisme.

Les Thenardiers de la détresse

Si dans le Rif la misère est omniprésente, à  Jerrada, elle l’est tout autant. Elle est d’abord dans la géographie, dans la topographie, dans les villes et dans la vie. Le désert est partout, même si les autorités esquissent épisodiquement quelques velléités de reboisements  qui refusent obstinément de se développer en raison d’une météo capricieuse et le plus souvent impitoyable. Les plaquettes du ministère du tourisme et son syndicat d’initiative romancent la réalité en évoquant « une nappe végétale importante……….une vallée verte contrastant avec l’ocre des montagnes………la construction de la centrale thermo-solaire de Beni-Mathar ». Des mots, rien que des mots qui ne feront pas oublier les maux et la misère des populations. Misère culturelle, éducative, scolaire, professionnelle, urbanistique, au point que des enfants oublient les rêves de leur âge pour tenter de faire vivre leur famille. Ils s’improvisent mineurs de fonds pour quelques kilos de charbon revendus à vil prix aux maquignons de la pauvreté, aux thénardiers de la détresse. Le drame qui a emporté les deux frères Dioui fin décembre 2017 rappelle cruellement cette terrible réalité que la mine clandestine fauche parfois plusieurs membres d’une même famille.

Un jour, au petit matin blême, sur les graviers d’une crique sauvage de la Méditerranée,  tous ces misérables qu’ils viennent de Jerrada ou d’Al Hoceima se retrouveront sous la férule de trafiquants avec, à la clé,  la promesse fumeuse d’une vie meilleure. Ils viendront alors grossir les rangs des clandestins qui vivent au ban de l’Europe, agonis par les ennemis de l’humanité qui en feront le fonds de commerce de leur politique.

Marie-Jo, par devoir, par humanité et sans aucun doute par conviction,  poursuit inlassablement son combat pour la liberté et la justice armée d’une détermination sans faille. Cri dans la nuit sombre du despotisme. Parcours d’une juste parmi les justes qui balise son chemin en illuminant celui de ses contemporains lorsqu’elle répercute les appels de détresse des amis de la liberté et dissémine à travers la toile les écrits des militants des droits de l’homme, leurs posts, leurs protestations et leurs espoirs.  

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